LÉPIDOPTÈRES

LÉPIDOPTÈRES
LÉPIDOPTÈRES

Les papillons sont souvent considérés comme les plus beaux des animaux, et les collectionneurs les recherchent pour leurs couleurs, qui peuvent être éclatantes et sont dues aux minuscules écailles couvrant les ailes de ces Insectes. Linné a jugé cette particularité si caractéristique qu’il en a tiré le nom de l’ordre des Lépidoptères (du grec﨎神晴﨟, écaille). En dehors de leur rôle éventuel dans l’absorption du rayonnement solaire, créant dans les ailes des différences de température propres à activer la circulation de l’hémolymphe, les écailles dessinent des figures signalétiques ou des dessins de camouflage qui sont parmi les plus perfectionnés qu’on connaisse dans le règne animal. Cependant les zoologistes ne peuvent se borner à définir les papillons comme des Insectes ayant quatre ailes couvertes d’écailles, car celles-ci, qui sont des soies tégumentaires modifiées, se rencontrent de façon générale chez les Arthropodes. Deux autres caractères fondamentaux définissent encore les Lépidoptères: les métamorphoses et la trompe.

On sait que le développement des papillons passe par trois phases: les larves (chenilles) deviennent des nymphes (chrysalides) desquelles naissent les papillons adultes; c’est un développement dit holométabole.

Quant à la trompe, qui n’existe qu’au stade adulte, c’est un organe suceur, tubulaire, apparemment simple, mais d’un extraordinaire raffinement dans sa structure détaillée. Dans la plupart des cas, les papillons l’utilisent pour la récolte du nectar des fleurs. Il est vraisemblable par conséquent que l’ordre des Lépidoptères groupe des Insectes dont l’évolution a accompagné celle des Phanérogames, au cours de l’ère tertiaire. En raison de leur haute spécialisation nutritionnelle, les adultes sont inoffensifs, voire même utiles à la pollinisation, mais il n’en est pas de même des larves, redoutables ennemies des cultures et des denrées entreposées; seul le ver à soie (chenille du Bombyx mori ) se range parmi les Insectes utiles.

1. Morphologie et biologie

L’adulte

La piéride du chou (Pieris brassicœ ), que l’on prendra comme type, est un papillon blanc très commun pendant la belle saison. Les ailes antérieures s’ornent seulement à leur face supérieure d’une tache apicale noire pour les mâles, tandis que les femelles possèdent en plus deux ou trois taches circulaires, noires également. Le couplage des ailes antérieures et postérieures est de type amplexiforme, comme chez les autres papillons diurnes: il n’y a aucun organe de coaptation spécial, et le couplage est réalisé par une simple adhésion entre les deux ailes rendue efficace grâce à la forme particulière de l’aile postérieure dont la région costale est élargie près de la base en une dilatation (lobe huméral) qui a pour effet d’augmenter la surface de contact entre les deux ailes. Les papillons nocturnes présentent d’autres modes de couplage des ailes: couplage par frein (frenulum) ou couplage par joug (jugum). Les antennes des piérides sont simples, en forme de tige renflée en massue à l’extrémité; il n’en est pas de même pour tous les papillons, dont certains ont des antennes dentées ou pectinées.

Les pièces buccales forment une trompe, enroulée en spirale à l’état de repos; lorsqu’elle est déroulée, elle peut prélever le nectar des fleurs (fig. 1). Cette trompe est constituée uniquement par les galéas des maxilles, démesurément allongées et creusées sur leur face interne de deux demi-gouttières dont l’accolement délimite le canal alimentaire. L’union des deux moitiés de la trompe est réalisée par deux coaptations (M. Charlanes et R. Gaumont, 1960). La coaptation antérieure (dorsale) se réduit à une rangée de longues soies qui se croisent et assurent ainsi l’étanchéité du canal mais ne jouent pas un rôle important dans l’accrochage des deux maxilles. Ce rôle est assuré par la coaptation postérieure (ventrale) qui est formée d’une double rangée de très nombreux crochets (jusqu’à trois mille chez Herse convolvuli ) souvent munis d’un talon qui assure une union très précise et solide des deux organes droit et gauche. Les deux pièces de la coaptation ont la particularité fort rare d’être symétriques et donc théoriquement interchangeables. Tous les autres constituants des pièces buccales (mandibules, labium, palpes maxillaires) sont atrophiés ou absents, à l’exception des palpes labiaux qui sont très grands et enveloppent la trompe repliée.

Cette interprétation de la trompe des papillons (galea de la maxille) n’a pu être établie que par l’étude comparée de certaines espèces primitives (Microptérygidés, Ériocranidés), qui sont mangeurs de pollen et possèdent des pièces buccales typiques; ils fournissent des exemples montrant (fig. 2) l’allongement de la galea et la réduction de la lacinia et des palpes maxillaires (R. J. Tillyard, 1923; A. Philpott et H. Eidmann, 1927).

La chenille

La chenille de piéride du chou, verte mais ornée de jaune, vit sur les Crucifères dont elle mange les feuilles. Elle présente la structure caractéristique de toutes les chenilles vraies (par opposition aux fausses chenilles des Hyménoptères Tenthrédinés): le corps, pourvu de neuf paires de stigmates respiratoires (fig. 3) est porté par trois paires de pattes thoraciques et cinq paires (au maximum) de fausses pattes abdominales munies de crochets.

La tête (face inférieure, fig. 3, à gauche) possède des pièces buccales broyeuses (seules les mandibules sont fonctionnelles, les maxilles réduites forment avec le labium la lèvre inférieure), les yeux sont réduits à cinq ocelles disposés en arc de cercle autour d’un sixième ocelle central.

L’anatomie des chenilles est simple (fig. 3): le tube digestif est un tube rectiligne comprenant un œsophage, un jabot, un intestin (mésentéron) très important et un intestin postérieur terminé par une ampoule rectale. Les tubes de Malpighi sont au nombre de six (deux groupes de trois se déversant en un tronc commun); leur extrémité distale est cryptonéphridiée, sauf chez quelques espèces aquatiques. Le système nerveux est formé d’un cerveau et d’une chaîne ganglionnaire ventrale comprenant un ganglion sous-œsophagien, trois ganglions thoraciques et sept abdominaux. Les glandes séricigènes (labiales) sont au nombre de deux; elles sont tubulaires et comprennent trois zones: une zone sécrétrice, un réservoir et un tube d’évacuation se terminant en un canal impair; elles sont formées de cellules géantes à noyaux polylobés (L. Lespéron, 1937; P. Allégret, 1956). Il existe en outre une paire de glandes mandibulaires, également tubulaires, qui ont un rôle encore mal connu.

Les chenilles ont généralement cinq stades larvaires et, arrivées au terme de leur développement, elles se transforment en chrysalides. Chez la piéride du chou, la nymphose a lieu à l’air libre et la chrysalide est maintenue à son support par un mince fil de soie formant une ceinture autour du corps et par un point de soie à l’extrémité du corps. Chez d’autres espèces diurnes (telle la vanesse) seule cette dernière fixation demeure et la chrysalide est pendue, tête en bas. Les papillons nocturnes se métamorphosent souvent dans la terre, mais de nombreuses espèces sécrètent avant la nymphose un cocon de soie, lâche et irrégulier ou serré et compact (tel le ver à soie), mais toujours formé par un fil de soie continu que la chenille enroule autour d’elle.

2. Problèmes taxinomiques

L’histoire des Lépidoptères est mal connue parce qu’on ne possède pas de fossiles plus anciens que l’Éocène [cf. MÉCOPTÉROÏDES]. Du fait que les Lépidoptères du Tertiaire peuvent être classés dans les familles actuelles, les espèces disparues ne sont d’aucun secours pour la systématique. En outre, l’homogénéité du groupe et le nombre considérable des espèces connues (plus de 100 000) rendent difficile et aléatoire toute classification. Les dessins et la pigmentation des ailes ne sont pas suffisamment constants pour lui servir de base. Les variations individuelles sont nombreuses. Certaines sont dues à des facteurs externes: les écarts de températures agissent sur les chrysalides des vanesses, modifiant la morphologie des adultes. D’autres sont dues à des mutations souvent de type sex-limited et, dans ce cas, c’est la femelle seulement qui est polymorphe, le mâle restant invariable. Enfin, on observe parfois des individus gynandromorphes en mosaïque, qu’on sait obtenir expérimentalement par hybridation entre certaines races géographiques d’une même espèce, comme les races japonaise et française de Lymantria dispar (travaux de R. Goldschmidt, 1931-1934). Les caractères utilisés en systématique sont donc la nervation alaire, le développement plus ou moins grand de certaines pièces buccales (mandibule, lacinia, palpe maxillaire), la structure de l’appareil génital femelle. L’armature génitale mâle qui est très utilisée dans la définition des espèces et des petits groupes (genre, sous-famille) ne joue pas grand rôle dans la systématique des familles.

De nombreux auteurs ont proposé des classifications (A. Spuler, 1908; J. H. Comstock, 1918; A. Handlirsch, 1925; C. Börner, 1925-1938; R. J. Tillyard, 1926). De nombreux ouvrages, certains richement illustrés, ont facilité la détermination des papillons (C. Oberthur, 1904-1925; A. Spuler, 1908-1910; A. Seitz, depuis 1906). Les classifications proposées sont variées et des termes reconnus comme insuffisants sont cependant toujours employés dans le langage courant. C’est ainsi qu’on a d’abord distingué les Diurnes, les Crépusculaires et les Nocturnes. On a également opposé les Rhopalocères, qui ont des antennes simples (les Diurnes), aux Hétérocères, dont les antennes sont pennées (les Crépusculaires et Nocturnes). On les a encore classés en Microlépidoptères (Microptérygidés, Ériocranidés, Monotrysiens, Tinéidés et Tortricidés) et en Macrolépidoptères.

Dans le Traité de zoologie publié sous la direction de P.-P. Grassé, J. Bourgogne adopte la division déjà proposée par A. D. Imms (1948) en Homoneures et Hétéroneures, division fondée sur la structure des ailes, les groupes inférieurs étant définis d’après la structure de l’appareil génital femelle. Les Homoneures, dont les quatre ailes ont une nervation semblable, comprennent les familles les plus primitives (Microptérygidés, Ériocranidés, Hépralidés). Les Hétéroneures, chez lesquels les ailes antérieures et postérieures sont différentes, sont divisés en Monotrysiens (un seul orifice à l’appareil génital femelle), avec les Stigmellidés et les Incurvaridés dont le type est Pronuba yuccasiella , et en Ditrysiens (deux orifices à l’appareil génital femelle) qui renferment toutes les autres superfamilles. Parmi elles, les Rhopalocères forment un ensemble homogène groupant Hespéridés, Papilionidés, Piéridés, Lycénidés et Nymphalidés. Tous les autres Ditrysiens comprennent aussi bien des espèces de petite taille comme les Tinéidés, les Hyponomeutidés, les Tortricidés, les Pyralidés que des espèces moyennes ou grandes comme les Cossidés, Sésiidés, Géométridés, Noctuidés, Notodontidés, Lymantriidés, Arctiidés, Bombycidés, Attacidés, Sphingidés, etc.

3. Éthologie

Mode de vie des adultes

À l’exception des Microptérygidés qui mangent les grains de pollen des Renonculacées, tous les papillons prennent une nourriture liquide (nectar des fleurs, liquides sucrés ou non). La plupart des espèces se posent pour butiner, mais quelques-unes (Macroglossa , etc.) s’immobilisent en vol devant une fleur dans laquelle pénètre la trompe qui est extrêmement longue. D’autres espèces, à trompe atrophiée, ne prennent pas de nourriture à l’état adulte (Euproctis , Orgya antiqua , Malacosoma neustria , Cossus cossus ...). Le rythme d’activité des papillons est des plus variables selon qu’ils sont diurnes, crépusculaires ou nocturnes; leur attitude au repos est d’ailleurs caractéristique; les premiers maintiennent leurs ailes relevées verticalement de telle sorte qu’on ne voit que leur face inférieure, les autres ont leurs ailes étalées à plat sur le support ou en toit. Certains papillons présentent une curieuse ressemblance avec les objets sur lesquels ils se posent (homotypie) comme le Gastropacha quercifolia qui a l’aspect d’une feuille morte et se voit difficilement sur les troncs d’arbres. Un cas de mimétisme très curieux est celui qui existe entre deux espèces de Lépidoptères appartenant à deux groupes taxinomiques différents mais vivant en un même milieu et volant ensemble. Les espèces mimées (généralement défendues naturellement contre les prédateurs par leurs sécrétions nauséabondes) appartiennent aux Danaïnés (exemple Danaus chrysippus ); les espèces mimantes qui se mêlent à elles en petit nombre et profitent de leur protection appartiennent aux familles les plus diverses (exemple Hypolimnas nisippus , Nymphalidés).

En revanche, le dimorphisme sexuel est très fréquent chez les Lépidoptères. Parfois étendu à l’ensemble du corps et en particulier aux coloris des ailes, il se limite souvent à des différences subtiles (glandes odoriférantes, morphologie antennaire), jouant néanmoins un rôle important dans l’attraction des sexes. La sécrétion de substances odorantes joue, en effet, un grand rôle dans la reconnaissance des sexes. Il existe sur la surface des ailes des mâles des écailles glandulaires ou androconies . Ces écailles creuses qui sont en continuité avec une cellule sécrétrice hypodermique constituent un appareil émetteur de substances odorantes dont le rôle supposé est moins d’attirer les femelles à distance que de les mettre dans un état réceptif lors des préparatifs de l’accouplement. La morphologie des androconies extrêmement variable a été découverte grâce à la microscopie à balayage (R. Sellier, 1971). Chez les Lycaenides, elles ont l’aspect d’écailles de forme assez banale, bien que de taille fort réduite. Ce sont parfois de simples poils dont l’apex s’épanouit en bouquets (exemple: Satyridés, Argyridés). Chez les Hespérides, le poil androconial se fragmente en une chaîne de particules fusiformes qui se séparent les unes des autres et qui peuvent être dispersées dans l’atmosphère, formant ainsi un nuage de particules odorantes lors de la rencontre des sexes [cf. BIOSPHÈRE]. Du reste, les papillons adultes consacrent une part essentielle de leur activité à la reproduction. Les œufs, de forme et de structure très complexe, sont pondus, isolés ou groupés de façon souvent caractéristique à la surface des végétaux sur lesquels se développeront les chenilles.

Mode de vie des chenilles

Pendant la marche comme au repos, l’adhérence au substrat est obtenue surtout à l’aide des crochets des fausses pattes abdominales qui fonctionnent en outre comme ventouses. Les pattes thoraciques servent surtout à la préhension des objets, principalement de la nourriture, sauf chez les espèces à fourreau portatif (exemple Psychidés). Le déplacement se fait par une sorte d’ondulation; cependant les chenilles «arpenteuses» des Géométridés, dépourvues des premières paires de fausses pattes, ont un mode de progression très particulier: la chenille courbe son abdomen en boucle et amène l’extrémité postérieure du corps juste derrière la région thoracique qui se porte ensuite en avant. Au repos, ces mêmes chenilles de Géométridés ressemblent bien souvent à une petite tige (homotypie), fixées par leurs pattes postérieures, le corps raidi et retenu obliquement par un fil de soie; elles sont bien difficiles à distinguer de la branche qui les supporte, d’autant qu’elles peuvent avoir une couleur imitant leur substrat (homochromie).

La plupart des chenilles de Lépidoptères sont solitaires, mais plusieurs espèces grégaires vivent dans un nid commun tissé autour des branches; certaines d’entre elles ne quittent pas leur nid, comme les Hyponomeutes du fusain ou du pommier ou comme le cul-brun (Euproctis ) des arbres fruitiers; d’autres l’abandonnent temporairement pour chercher leur nourriture, comme les chenilles processionnaires du pin et du chêne (Thaumatopoea ) velues et violemment urticantes. Ces chenilles quittent leur nid toutes ensemble et cheminent les unes derrière les autres à la suite d’un individu de tête qui joue le rôle de guide. Le fil de soie qu’elles laissent derrière elles leur sert de repère.

Les polyphages

Toutes les chenilles ne sont pas phytophages; certaines espèces connues sous le nom de «teignes» («mites») se nourrissent des matières les plus variées; les plus communes sont les teignes des vêtements (Tineola biseliella , Trichophaga tapazella , Tinea pellionella ) qui rongent les laines, les tapis, les fourrures, etc. La teigne des ruches (Galleria melonella ) se nourrit des gâteaux de cire des abeilles et aussi du pollen qui s’y trouve. La teigne du bouchon (Oenophila flavum ) vit dans les caves et ronge les bouchons. L’alucite des céréales (Sitotroga cerealella ) dévore les grains, tandis que la teigne de la farine (Ephestia kuehniella ) attaque farine, biscuits, etc.

Les phytophages

Les chenilles défoliatrices commettent des dégâts les plus spectaculaires et comptent parmi les grands ennemis des cultures fruitières et des forêts. La phalène hiémale (Cheimatobia brumata ) est un papillon grisâtre présentant un dimorphisme sexuel notable: le mâle a des ailes normalement développées, la femelle est presque aptère; les adultes apparaissent à l’automne et l’hibernation a lieu à l’état d’œuf; au printemps, les chenilles dévorent les bourgeons et les jeunes pousses des arbres fruitiers. Le bombyx neustrien, ou livrée (Malacosoma neustria ) passe aussi l’hiver sous forme d’œuf; la ponte en anneau autour des rameaux est caractéristique; les chenilles, rayées longitudinalement de bleu, de gris et de rouge, dévorent les feuilles des arbres forestiers et fruitiers. Le bombyx disparate, appelé aussi spongieuse, présente un grand dimorphisme sexuel. Les culs-bruns (Euproctis phaeorrhea et E. chrysorrhea ) aux ailes blanches doivent leur nom à la touffe de poils roux que porte l’extrémité de l’abdomen de la femelle; les chenilles vivent dans des nids où elles passent l’hiver. Dans le cas de l’hyponomeute enfin (Hyponomeuta malinella ), les chenilles de taille plus petite sont assemblées en grand nombre dans des nids, sur les fusains et sur les pommiers. Les végétaux sont encore attaqués par de nombreuses autres espèces, dont le grand paon de nuit (Saturnia pyri ), le bombyx de l’ailante (Attacus cynthia ), l’Abraxas grossulariae ou le Papilio machaon ; leurs chenilles vivent respectivement sur le poirier, le vernis du Japon, le groseillier, les Ombellifères.

D’autres chenilles de petite taille vivent en mineuses à l’intérieur du parenchyme foliaire. Beaucoup plus nuisibles sont les tordeuses (famille des Tortricidés) qui ont l’habitude de rouler ou plier les feuilles ou les jeunes pousses des plantes sur lesquelles elles vivent (Tortrix viridana , Cacœcia rosana , etc.). Les plus nuisibles sont sans doute les espèces inféodées à la vigne: la pyrale de la vigne (Sparganothis pilleriana ) et surtout l’eudémis (Polychrosis botrana ), ou tordeuse des grappes, qui est, avec le ver du raisin (Cochylis ambiguella ), le plus dangereux ennemi des vignobles. À cette même famille appartient aussi le «ver» des pommes et des poires (Carpocapsa pomonella ) qui est l’un des parasites les plus désagréables de ces fruits. L’une des rares espèces cécidogènes de Lépidoptères, Evetria resinella , qui détermine la formation d’une galle résineuse à l’extrémité des pousses de pin, est aussi un Tortricidé.

Si de nombreuses espèces de noctuelles dont les chenilles vivent en terre (vers gris) se nourrissent de racines et commettent des dégâts considérables aux cultures, particulièrement aux cultures de céréales ou de betteraves (exemple Agrotis segetum ), d’autres espèces vivent à l’intérieur même du bois et sont xylophages. Les plus connues sont le cossus ou «gâte-bois» (Cossus ligniperda ) qui vit dans les arbres forestiers (chêne, orme, peuplier) ou fruitiers (poirier, prunier, etc.) et la zeuzère (Zeuzera pyrina ) qui détruit les jeunes arbres (poirier, marronnier, etc.). Quant aux sésies, leurs chenilles creusent également des galeries dans le bois.

Les chenilles aquatiques sont peu nombreuses, et la plupart sont des Pyralidés de la sous-famille des Nymphulidés (genre Nymphula ) qui vivent dans un fourreau de soie fixé aux nénuphars. Certaines d’entre elles viennent chercher l’air à la surface de l’eau, d’autres au contraire absorbent par osmose l’oxygène dissous; d’autres encore ont des trachéobranchies. Parfois, les échanges se font directement par la surface du corps pendant les premiers stades larvaires, puis les trachéobranchies apparaissent ensuite.

Les espèces parasites

Un petit nombre d’espèces de Lépidoptères seulement sont parasites. Les plus intéressantes appartiennent à la famille des Lycénidés, élégants petits papillons dont les ailes sont vivement colorées à leur face inférieure; les mâles sont généralement bleus, tandis que les femelles sont brunes. Leurs chenilles sont parfois phytophages, mais certaines espèces sont exclusivement carnivores et prédatrices d’Homoptères: Membracides, Jassides, Coccides et Aphides (ou Pucerons), également recherchés par les fourmis. Aussi rencontret-on généralement ces trois groupes d’insectes ensemble à l’air libre ou dans les fourmilières. Les chenilles y pénètrent par leurs propres moyens ou sont transportées par les fourmis; en effet, de nombreuses espèces de chenilles de lycènes possèdent sur les derniers segments de leur abdomen des glandes exsertiles particulières (organes myrmécophiles) dont les sécrétions attirent les fourmis qui en sont très friandes. Ainsi Maculinea (ou Lycaena ) arion , phytophage dans le jeune âge, cesse de s’alimenter après la troisième mue et erre jusqu’à ce qu’une fourmi l’emporte dans son nid où elle vivra une dizaine de mois en parasite, se nourrissant de larves de fourmis.

Le ver à soie

Si de nombreuses espèces de Lépidoptères peuvent être utilisées pour leur production de soie (Antheraea pernyi , Saturnia arrinda , Attacus cynthia , etc.), seul le bombyx du mûrier (Bombyx mori ) est élevé systématiquement. Domestiqué depuis longtemps par l’homme, il n’existe plus à l’état sauvage. La larve, ou ver à soie proprement dit, est une chenille glabre d’un blanc sale peu active; elle donne un papillon blanchâtre, lourd, incapable de voler en raison de son poids et des petites dimensions de ses ailes; ses pièces buccales sont atrophiées et il ne s’alimente pas. La vie imaginale, courte, est uniquement consacrée à la reproduction. Après la fécondation, la femelle pond environ cinq cents œufs (ou graines) disposés côte à côte sur n’importe quel support. Pondus au mois de juin, les œufs subissent une diapause embryonnaire et n’éclosent qu’au début de mai de l’année suivante (races univoltines), mais il existe des races donnant plusieurs générations annuelles (races bivoltines ou polyvoltines). À leur naissance, les jeunes chenilles ne mesurent que trois millimètres; à leur taille maximale elles atteignent quatre-vingts millimètres. Leur nourriture principale (pratiquement la seule qui leur convienne) est la feuille du mûrier. Après trente à quarante jours, arrivées au terme de leur développement, elles cessent de s’alimenter: c’est alors que ces chenilles, auparavant si peu mobiles, s’agitent soudainement et cherchent à s’élever au-dessus de leur support (période de la montée), puis elles commencent le tissage du cocon, à l’abri duquel elles se nymphoseront. L’extérieur du cocon est constitué par un réseau régulier de soie lâche; la partie interne, au contraire, est formée d’un tissu très serré constitué par un seul fil ininterrompu dont la longueur peut dépasser 1 500 mètres; c’est cette partie qui, déroulée, donnera la soie grège utilisée dans les filatures. La soie est produite par les deux glandes séricigènes dont l’orifice est situé sur le labium. Le fil issu de la filière a une structure double et résulte de la coalescence des deux brins issus de chacune des deux glandes séricigènes. Chaque brin a une épaisseur de quinze à vingt microns et est formé de deux zones: à la périphérie, le «grès», ou «séricine», et à l’intérieur la fibroïne (qui seule a une structure double). Au point de vue physiologique, la soie correspond à une excrétion; c’est un produit de déchet de l’alimentation azotée; la rétention expérimentale de la soie par cautérisation de la filière est toxique pour l’organisme (L. Lespéron, 1937; P. Allégret, 1956).

Le pays d’origine du ver à soie du mûrier serait la Chine et ce serait l’épouse de l’empeur Huangdi, connue sous le nom de Dame de Xiling, qui, 2 600 ans avant notre ère, aurait, pour la première fois, élevé des vers à soie et trouvé le moyen de dévider leur cocon et d’en tisser les fils. La méthode se propagea rapidement, au point que la production de la soie devint très vite une des principales richesses du pays qui en conserva jalousement le secret pendant près de 3 000 ans. Mais, malgré les précautions prises, les moyens d’obtenir la soie furent connus au Japon, puis en Perse. Vers 550, deux moines du mont Athos ramenèrent de Perse en Grèce des œufs de vers à soie et des graines de mûrier. Mais la nouvelle industrie ne fut introduite en France que vers le XIIIe ou le XIVe siècle et ne prit son essor que sous Henri IV, puis retomba en sommeil. Relancée par Colbert, elle ne cessa de croître jusqu’au XIXe siècle. En 1855, la pébrine, maladie du ver à soie [cf. CNIDOSPORIDIES] compromit tout l’élevage français. Mais, bien que la maladie fût jugulée à la suite des travaux de Pasteur, la production ne cessa de décroître depuis cette époque. Cependant, de nombreuses races de vers à soie ont été sélectionnées en Chine et au Japon, entre lesquelles les sériciculteurs ont le choix, selon qu’ils envisagent la qualité ou la quantité de soie produite, ou encore la rapidité de développement des chenilles.

lépidoptères [ lepidɔptɛr ] n. m. pl.
• 1754; lat. sav., de lépido- et -ptère
Zool. Ordre d'insectes à deux paires d'ailes couvertes de minuscules écailles, possédant une longue trompe pour aspirer les aliments. papillon(cour). Larve ( chenille) , nymphe ( chrysalide) des lépidoptères. Au sing. Un lépidoptère. Adj. Insecte lépidoptère.

lépidoptères
n. m. pl. ENTOM Ordre d'insectes, nommés cour. papillons, à deux paires d'ailes membraneuses couvertes d'écailles colorées, et dont les appendices buccaux forment une trompe enroulée en spirale qui aspire le nectar des fleurs.
Sing. Un lépidoptère.

lépidoptères [lepidɔptɛʀ] n. m. pl.
ÉTYM. 1754; lat. sav. lepidoptera (1744, Linné); du grec lepis, lepidos (→ Lépido-), et ptéron (→ -ptère).
Zool. Ordre d'animaux arthropodes antennifères de la classe des insectes, ainsi nommés à cause des fines écailles qui recouvrent leurs ailes. || Les papillons sont des lépidoptères. || Les lépidoptères, insectes à métamorphoses complètes (avec nymphe immobile). || Sous-ordres des lépidoptères : hétérocères, microlépidoptères, rhopalocères. || Familles des lépidoptères : hespéridés, noctuéliens, tortricidés… || Principaux lépidoptères : achérontia, aglosse, agrotis, alucite, bombyx, cochylis, cossus, 2. danaïde, gallérie, géomètre (ou phalène), hépiale, hyponomeute, liparis, machaon, mite, noctuelle, parnassien, piéride, pyrale, saturnie, satyre, teigne, uranie, vanesse, xanthie, zeuzère, zygène… || Larve des lépidoptères. Chenille. || Collectionner (cit.) des lépidoptères. || L'appareil stridulant des lépidoptères. Archet (3.). || Les lépidoptères sont des pollinisateurs (cit. 2).Au sing. || Un lépidoptère.
0 Gourdon possédait une collection de lépidoptères, mot qui faisait espérer des monstruosités et qui faisait dire en les voyant : « Mais c'est des papillons ! »
Balzac, les Paysans, Pl., t. VIII, p. 230.
Appos. ou adj. Rare. || Insecte lépidoptère.
tableau Classification des insectes.
DÉR. Lépidoptériste.
COMP. Lépidoptérologie. Macrolépidoptères, microlépidoptères.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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